Depuis l’Antiquité, l’or fascine par sa rareté, sa beauté et son rôle de valeur refuge. Monnaie d’échange puis actif financier, il a traversé les siècles en s’adaptant aux crises. En 2025, ce rôle se renforce face à une série de chocs mondiaux : inflation persistante, guerre en Ukraine, tensions au Moyen‑Orient, incertitudes monétaires et affaiblissement du consensus international.

Entre janvier 2024 et juin 2025, son cours passe de 2 063 $ à plus de 3 400 $ l’once, soit une hausse de près de 65 %. L’or redevient ainsi un pilier des arbitrages économiques et stratégiques.

Des prix de rachat records

Cette hausse fulgurante se reflète immédiatement dans les prix de rachat proposés aux particuliers. En juin 2025, le prix de rachat de l’or atteint des niveaux historiques. Il est désormais possible d’obtenir 65 euros le gramme pour de l’or 18 carats, et jusqu’à 92 euros le gramme pour de l’or 24 carats, soit de l’or pur.

Les comptoirs spécialisés, bijoutiers et plateformes de revente sont en forte activité, sollicités par des ménages cherchant à profiter de la valorisation exceptionnelle de leurs bijoux, lingots ou pièces. L’or physique revient au centre des préoccupations domestiques, tant pour sa liquidité que pour sa capacité à servir de réserve immédiate.

Les conflits géopolitiques comme moteur de la hausse

Au premier plan des facteurs déclencheurs, les tensions internationales jouent un rôle prépondérant. Les frappes israéliennes sur des installations nucléaires iraniennes en juin 2025 ont fait bondir les cours du pétrole de 11 % en quelques jours, ce qui a accru les pressions inflationnistes à l’échelle globale.

Ce regain d’instabilité s’ajoute à des conflits prolongés : la guerre en Ukraine, la situation en Syrie, ou encore les rivalités commerciales entre Washington et Pékin, nourries par les annonces protectionnistes de l’administration Trump. L’incertitude généralisée pousse les capitaux à se réfugier vers les actifs jugés les plus sûrs. L’or se hisse ainsi comme l’un des derniers piliers de stabilité perçue.

Les banques centrales renforcent leurs réserves

Face à ces bouleversements, les banques centrales poursuivent leur stratégie d’accumulation. En 2024, elles ont acheté plus de 1 000 tonnes d’or pour la troisième année consécutive. Le total des réserves mondiales détenues par ces institutions atteint désormais près de 36 000 tonnes, un sommet inégalé depuis 1965.

Cette politique répond à une volonté claire : réduire la dépendance au dollar, protéger les actifs contre les turbulences monétaires, et se doter d’une réserve tangible, indépendante des circuits bancaires. L’Inde, la Chine, la Turquie et plusieurs pays d’Asie centrale figurent parmi les acheteurs les plus actifs, illustrant un basculement du centre de gravité économique.

Inflation persistante et taux réels sous pression

Les perturbations dans les chaînes logistiques, la volatilité des prix de l’énergie et la révision des politiques industrielles ont maintenu une pression haussière sur les prix tout au long de 2024. Même si les grandes banques centrales ont ralenti la cadence des hausses de taux, l’inflation reste supérieure aux objectifs fixés.

En Europe, la perspective d’un début de détente monétaire en 2025 pèse sur les taux réels. Lorsque ces derniers deviennent faibles, voire négatifs, l’or retrouve mécaniquement de l’attrait. Il sert alors de rempart contre l’érosion du pouvoir d’achat. Les investisseurs institutionnels et particuliers ajustent en conséquence leurs allocations.

Les ETF dynamisent la demande mondiale

Depuis plusieurs années, les ETF adossés à l’or (Exchange Traded Funds) participent activement à l’essor du métal jaune. Faciles d’accès, liquides et transparents, ces instruments financiers permettent une exposition à l’or sans en détenir physiquement.

Depuis 2022, les flux entrants vers ces fonds n’ont cessé de croître. En 2025, cette tendance se confirme, portée par une double motivation : la recherche de couverture contre les risques systémiques et la spéculation sur la poursuite du mouvement haussier. L’or devient un actif de plus en plus central dans les portefeuilles diversifiés, au même titre que les actions ou les obligations.

Corrélations entre matières premières, devises et or

Le lien entre le pétrole et l’or se vérifie une fois encore. La montée des prix du brut stimule les anticipations inflationnistes, lesquelles favorisent l’or comme contrepartie stable. Parallèlement, la faiblesse du dollar américain amplifie l’élan haussier.

Miné par les déficits jumeaux et des incertitudes politiques internes, le billet vert recule face à un panier de devises, rendant l’or plus attractif pour les acheteurs internationaux. Les marchés boursiers, de leur côté, connaissent des phases de grande volatilité, ce qui accentue les arbitrages défensifs en faveur de l’or.

Un parallèle avec 2020

Certains analystes comparent la situation actuelle à celle de 2020, en pleine crise sanitaire, où l’or avait gagné 22 % en six mois. Les conditions diffèrent. La baisse récente du VIX, indice de volatilité, pourrait annoncer un apaisement. Des prises de bénéfices restent envisageables, les cours approchant des seuils psychologiques sensibles.

La question d’un retournement se pose, bien que les fondamentaux demeurent solides. La poursuite de la tendance haussière dépendra des tensions persistantes, du calendrier monétaire et de l’inflation.

Entre incertitude et consolidation

Porté par des facteurs exceptionnels, le métal jaune a trouvé en 2025 un terrain favorable aux records. Inflation persistante, affaiblissement des monnaies, achats massifs des banques centrales et anticipation de baisses de taux ont nourri sa progression. Face à ces tensions, l’or s’impose comme valeur refuge. Reste à voir si la crise russo-ukrainienne, les tensions avec l’Iran ou les décisions futures de la Fed et de la BCE prolongeront cette dynamique ou amorceront une consolidation. Les investisseurs restent suspendus à un équilibre mondial instable.